Du « business case » à la stratégie RSE : le renouveau de la diversité

Diversité

LA DIVERSITÉ "MADE IN FRANCE" : SA PORTÉE ET SES LIMITES

Au milieu des années 2000, le "diversity management" né au États-Unis dans les années 80, fait son apparition en France et se diffuse dans le monde de l’entreprise. Cette nouvelle problématique managériale n’est pas un copier-coller de son modèle américain, elle revêt une coloration spécifique qui aboutit à une diversité made in France" articulée autour de trois composantes essentielles.

La première composante est un nouvel arsenal de lois anti-discriminatoires (2001 et 2008) renforcé sous l’impulsion du droit européen. La transposition des directives européennes dans le droit français de la non-discrimination l’ont réorienté vers un droit de mise en œuvre, plus opérationnel, avec l’introduction des critères de discrimination (16 critères en 2001, 25 aujourd’hui) et l’introduction des notions distinctes de discrimination directe et indirecte.

La seconde composante est l’objectif d’égalité des chances, au service duquel sont remises en valeur les "actions positives", mesures temporaires, correctives ou réparatrices, prises en faveur de personnes faisant ou ayant fait l’objet de discrimination.

Enfin, la troisième composante est le ce que l’on a appelé "business case" de la diversité" qui met en avant l’avantage compétitif procuré par la mise en œuvre d’une politique de diversité : augmentation des viviers de recrutement, meilleure adaptation aux différents clients, conquête de nouveaux marchés, renforcement de la marque employeur ...

Les entreprises françaises s’en sont emparées, car le "business case" parle leur langage, celui de la performance économique. Ce discours pragmatique a permis de convaincre les directions et les lignes managériales que la diversité est associée à des enjeux de gestion et se pose comme un domaine légitime d’intervention des entreprises. Cela fonctionne car la diversité rime aujourd’hui avec performance globale, innovation et créativité.

Notons cependant qu’une partie du monde académique conteste cette invention rhétorique qui nous vient des États-Unis au motif que la portée juridique et morale des politiques anti-discriminatoires serait effacée au profit d’un discours sur l’efficacité économique, la plus-value économique ne pouvant pas être le seul guide valable pour les entreprises.

LA DIVERSITÉ ACQUIERT UNE DIMENSION STRATÉGIQUE, FAITE POUR DURER
Aujourd’hui, on observe un mouvement de balancier qui fait que la diversité est mise en valeur dans une dimension moins économique, et plus globale et politique, c’est-à-dire plus tournée vers la création de valeur pour l’entreprise certes, mais aussi pour la société.

La dernière enquête menée auprès des entreprises signataires de la charte de la diversité (1) illustre cette tendance. 70% des entreprises (la plus grande proportion) s’engagent dans la diversité "pour son intégration dans une politique globale de RSE".

La diversité acquiert en ce sens une nouvelle dimension qui la place au cœur des enjeux stratégiques des entreprises. Et cela semble fait pour durer. Le baromètre Edelman (2) mesure, chaque année, la confiance de la population mondiale vis-à-vis de quatre institutions : les états, les médias, les entreprises et les ONG.

Les résultats du baromètre 2017 marquent l’implosion de la confiance à l’échelle mondiale : effondrement de la confiance vis-à-vis des états et des médias qui atteint son plus bas niveau historique. L’entreprise reste le dernier bastion de la confiance (52%), même si son score est en baisse. Des quatre institutions, l’entreprise est considérée comme la seule qui peut faire la différence : 3 répondant.es sur 4 sont d’accord pour dire que l’entreprise peut prendre des mesures pour à la fois augmenter les profits et améliorer les conditions économiques et sociales dans la communauté où elle opère.

 

Karine Armani

1.Bilan diversité – Edition 2017, Charte de la diversité

2. Baromètre Trust Edelman 2017