Ce qu’il faut retenir du dernier rapport annuel du HCE 

En dépit des évolutions législatives – avec notamment l’introduction en 2015 de la notion d’agissement sexiste dans le code du travail[1]  –  la 6e édition du rapport[2] annuel sur le sexisme publié ce lundi 22 janvier par le Haut Conseil à l'Egalité (HCE) nous révèle que le monde du travail reste perçu comme une des sphères les plus inégalitaires de la société. En effet, on y apprend, d’après un baromètre[3] réalisé pour cette étude, que plus de trois quarts des Français·es considèrent qu’en milieu professionnel, les femmes et les hommes ne sont pas égaux.

Un des constats les plus saisissants ? Que 46% des Français·es pensent que pour correspondre aux attentes de la société, une femme doit faire passer sa famille avant sa carrière professionnelle, une proportion aussi élevée que celles et ceux qui pensent le contraire. Cette croyance renforce l’idée, pas nécessairement conscientisée et encore moins dicible, que le salaire d’une femme ne serait qu’une source de revenu complémentaire au sein d’un foyer hétérosexuel, tandis que celui de son conjoint en serait la principale. Cela entretient l’idée que « les femmes ça coûte moins cher que les hommes », les inégalités salariales, et empêche les femmes d’être perçues comme faisant partie intégrante du monde du travail.

C’est également ce qui explique le fait que, selon le même baromètre, près de 20% des Français·es considèrent que « les femmes prennent les postes des hommes sur le marché du travail ». Cette proportion grimpe même à 31% parmi les hommes de 25 à 34 ans, ce qui, sans vouloir stigmatiser une partie de la population, n’est pas nécessairement rassurant : cette tranche d’âge correspond souvent à celle des premières prises de responsabilités managériales, et donc à une capacité à pouvoir, grâce à un rôle de décideur, perpétuer ou au contraire infléchir des pratiques sexistes. La lutte contre le sexisme ne pourra donc pas être efficace sans leur implication.

Comment les impliquer ? Pour rappel, l’accès au marché du travail n’est ni une guerre ni un jeu à somme nulle entre les sexes. De surcroît, les injonctions genrées stéréotypées à l’égard des hommes peuvent aussi être à l’origine de souffrances masculines. Alors que la prévention contre les violences sexistes et sexuelles est obligatoire en entreprise, utilisons ce cadre pour former l’ensemble des collaborateurs et collaboratrices à repérer, prévenir et agir contre le sexisme, afin qu’ils prennent conscience qu’un monde du travail (et une société !) sans sexisme serait plus performant, inclusif et serein.

Marc Normand

Consultant EQUILIBRES

Sources

[1] Article L1142-2-1, du code du travail, « Nul ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. » , URL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000031072447

[2] HCE, Rapport annuel 2024 sur l’état des lieux du sexisme en France, 2024, URL : https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/stereotypes-et-roles-sociaux/actualites/article/6eme-etat-des-lieux-du-sexisme-en-france-s-attaquer-aux-racines-du-sexisme

[3] Etude réalisée par l’institut Viavoice pour le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. Terrain en ligne réalisé du 15 au 30 novembre 2023 auprès d’un échantillon de 3 500 personnes résidant en France métropolitaine représentatif de la population française âgée de 15 ans et plus. URL : https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/stereotypes-et-roles-sociaux/actualites/article/6eme-etat-des-lieux-du-sexisme-en-france-s-attaquer-aux-racines-du-sexisme