Aidants familiaux : les oubliés des politiques d’inclusion
Quels que soient leur taille ou leur secteur d’activité, les entreprises et organisations sont de plus en plus nombreuses à reconnaitre l'importance de créer des environnements de travail où chaque employé·e se sente valorisé·e et respecté·e. Pourtant, dans leurs efforts à promouvoir l'inclusion, celles-ci oublient souvent de s’intéresser aux aidants familiaux.
Ce phénomène s’explique en premier lieu par leur difficulté à les identifier donc à les recenser. En effet, bon nombre d’aidants ignorent eux-mêmes faire partie de cette catégorie. Pour les autres, et c’est là la seconde difficulté, la discrétion semble la meilleure option. En effet, comment signaler sa propre situation quand la dépendance est un tabou de société et que le handicap génère bon nombre d’idées reçues ? Beaucoup préfèrent ainsi garder leur statut secret, par crainte de stigmatisation ou de répercussions professionnelles. Pourtant, ces collaborateurs et collaboratrices qui « fournissent des soins non rémunérés à un membre de leur famille ou à un proche en situation de maladie, de handicap ou de perte d'autonomie » méritent une attention particulière. Ils sont en effet confrontés à un bouleversement de vie non désiré qui les obligent à répondre à des défis uniques.
Les aidants familiaux : un groupe silencieux
Cette réalité passée sous silence retarde inévitablement toute possibilité de prise de conscience par les entreprises. Ce qui ne se voit pas…n’existe pas, et sans possibilité de pouvoir identifier les aidants parmi leurs employé·es, aucun passage à l’action et aucune politique adaptée ne voit le jour.
Or, la part de cette population va continuer d’augmenter ces prochaines années, d’où l’importance de prendre les devants. Les derniers chiffres publiés donnent déjà le vertige. En 2021, ils étaient 9,3 millions à déclarer apporter une aide régulière à un proche en situation de handicap ou de perte d’autonomie [1]. Les proches aidants représentent 20% des salarié·es [2]. Ce pourcentage culmine entre 55 et 64 ans, mais il est important de noter que les salarié·es deviennent aidants de plus en plus jeunes [3]. Le vieillissement démographique attendu pourrait mettre sous tension les proches aidants de personnes âgées.
Les défis des aidants au travail
Aujourd’hui, peu nombreuses sont encore les entreprises et organisations qui adressent les besoins spécifiques de ces employé·es dévoué·es et les intègrent dans leur politique parentalité ou seniors. Or l’enjeu de conciliation vie personnelle-vie professionnelle est de taille pour ces aidants, qui, en plus de leurs responsabilités professionnelles, assument des tâches de soins qui vont de l'administration de médicaments au suivi des rendez-vous médicaux, en passant par la gestion des activités quotidiennes de leur proche nécessitant une assistance sans oublier la part conséquente de l’administratif lié à presque chacune de ces tâches. La plupart d’entre eux doivent jongler entre leur travail, leurs responsabilités de soins et les autres pans de leur vie personnelle, ce qui, à la longue, peut entraîner une charge mentale et émotionnelle épuisante. En effet, les impacts du statut d’aidant sur le travail sont nombreux. Parmi les plus fréquents on peut citer l'absentéisme occasionné par les responsabilités de soins, la difficulté à se concentrer en raison du stress et de l'épuisement, ainsi que la difficulté à progresser dans leur carrière en raison de l'absence fréquente ou de la réduction de leurs heures de travail.
L'absence de politiques d'inclusion spécifiques signifie que ces employé·es peuvent être laissés pour compte. Ils risquent, par exemple, de ne pas bénéficier des aménagements de travail flexibles, des congés payés ou des avantages sociaux qui leur permettraient de mieux équilibrer leurs responsabilités de soins avec leur vie professionnelle.
L'importance de l'inclusion des aidants familiaux
Il est crucial que les entreprises reconnaissent la valeur des aidants familiaux en tant qu'employé·es en situation de fragilité et mettent en place des politiques d'inclusion adaptées. Les politiques RSE, lorsqu’elles existent, commencent lentement à intégrer ces notions : cela peut inclure la mise en place de congés rémunérés pour les aidants, la possibilité de travailler à distance ou des horaires de travail flexibles, ainsi que des services de soutien aux employé·es pour les aider à gérer leur double rôle. Mais ces premiers pas sont encore trop timides.
Quelles sont les mesures à la main des entreprises ?
En entreprise, la prise en compte des aidants doit passer par la sensibilisation pour les accompagner à se reconnaitre comme tels, tout comme la psychoéducation de l’ensemble des acteurs de l’entreprise, afin que les aidants soient capables de soutenir leurs proches en évoluant dans un environnement de travail respectueux, compréhensif et altruiste. Pour les entreprises ou organisations qui ont osé franchir le pas, l’impact social de leur décision ne s’est pas fait attendre. Parmi les effets positifs, on peut citer le renforcement du sentiment de cohésion, davantage de justice sociale, la possibilité de valoriser l’engagement de leurs collaborateur·rices ainsi que la sécurisation des parcours professionnels au cœur même de l’entreprise. Le résultat ? Une marque employeur renforcée qui permet d’attirer et retenir les talents tout au long de leur carrière.
Enfin n’oublions pas que les aidants familiaux sont une composante précieuse de la main-d'œuvre. Il est temps de faire en sorte qu’ils ne soient plus les oubliés des politiques d'inclusion. Les entreprises ont un rôle à jouer, mais ne peuvent, à elles-seules relever ce défi. Des mesures étatiques ambitieuses sont nécessaires afin de soutenir les efforts consentis par ces dernières.
Sources :
1 - Source étude DRESS L’enquête Vie quotidienne et santé https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/etudes-et-resultats/93-millions-de-personnes-declarent-apporter-une-aide-reguliere-un
2 - Prev&Care
3 - Sources OCIRP https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/c-est-mon-boulot/info-franceinfo-emploi-en-france-on-devient-aidant-familial-de-plus-en-plus-jeune_5372098.html
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PODCAST | Devenir aidant d'un proche
Dans ce podcast, Salomé Benhaim-Cohen et Dorothée de Trégomain, psychologues cliniciennes chez Stimulus, nous parlent de la notion d'aidance pour vous aider à comprendre si vous êtes concernés par ce rôle auprès de vos proches.
AIDANTS+
Alors que la question des aidants familiaux devient prioritaire au sein de la société et pour les entreprises en particulier, Stimulus propose désormais une offre dédiée au soutien des salariés aidants : Aidants+ pour accompagner les DRH dans la mise en place de programmes de promotion de la qualité de vie au travail.
